Allocution de M. Éric Besson
Ministre de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale
et du développement solidaire
Journée Mondiale des Réfugiés
Rencontre avec les familles de réfugiés irakiens
Jeudi 18 juin 2009
Seul le prononcé fait foi
Mesdames et Messieurs,
Notre rencontre aujourd’hui dans ce salon du ministère de l’immigration, qui est aussi le ministère de l’asile, est la rencontre d’une tradition et d’un héritage : la tradition, c’est celle de la protection apportée par la France à toutes les victimes de persécutions ; l’héritage, c’est celui de la présence multiséculaire sur les terres d’Orient de minorités religieuses – chrétiennes, musulmanes ou juives.
Rappeler cette tradition et cet héritage, c’est faire apparaître la détresse dans laquelle les minorités religieuses d’Irak – que vous représentez aujourd’hui dans leur diversité – sont plongées depuis de nombreuses années.
La France, dont on connaît le rôle historique dans la protection des Églises d’Orient, ne pouvait rester sourde à l’appel au secours que ces minorités – notamment la minorité chaldéenne, mais aussi la minorité chiite – lui ont adressé. La France ne pouvait pas davantage être insensible à la situation douloureuse des Palestiniens chassés d’Irak et réfugiés en Syrie.
Mais c’est au courage et au dévouement d’hommes de cœur et de conviction que notre pays doit de pouvoir aujourd’hui vous accueillir sur son sol.
Qu’il me soit permis de remercier chaleureusement, en notre nom à tous, les efforts déployés par Mgr Pierre Whalon, évêque représentant en Europe l’église épiscopale anglicane des Etats-Unis, pour avoir relayé jusqu’en France l’appel au secours des minorités persécutées d’Irak.
Cet appel, entendu et soutenu par plusieurs membres de l’administration française qui sont aujourd’hui présents à nos côtés [Maxime Tandonnet, Stéphane Chmelewsky, Jean-Pierre Guardiola], s’est traduit, au mois de novembre 2007, par la décision du Président de la République d’accueillir, au titre de la solidarité internationale, 500 ressortissants irakiens menacés. Face à la gravité de la situation, ce chiffre a été porté, en 2008, à 1 200 personnes.
L’Association d’entraide aux minorités d’Orient (AEMO), créée en 2007 par Mgr Whalon, et le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR) se sont alors mobilisés pour identifier les familles les plus menacées ou les plus vulnérables, qu’elles soient encore présentes en Irak ou déplacées dans les pays voisins, et les aider à rejoindre la France afin d’y faire valoir leurs besoins de protection et de prise en charge.
Mon prédécesseur, M. Brice Hortefeux, et le ministre des Affaires étrangères, M. Bernard Kouchner, ont accueilli le 18 décembre dernier le « 500ème réfugié Irakien ». À ce jour, ce sont plus de 730 Irakiens qui sont arrivés en France dans le cadre de l’opération de réinstallation engagée par les autorités françaises – 495 par l’intermédiaire de l’AEMO et 244 par le biais du HCR. 136 autres Irakiens, pour lesquels la décision de réinstallation a été prise, doivent arriver prochainement et 329 dossiers sont encore à l’étude.
La mobilisation de l’ANAEM, devenu Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII), celle de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), celle encore du service de l’asile du ministère de l’immigration et des ambassades français ont permis d’acheminer en France les familles retenues.
Leur prise en charge a ensuite été assurée, selon les cas, par les entourages familiaux déjà installés en France, par les structures habituelles d’accueil des réfugiés ou des demandeurs d’asile, ou encore par les dispositifs d’« appartement relais » proposés par les associations Forum Réfugiés et France Terre d’asile et financés au titre des crédits d’intégration de ce ministère.
Cette « chaîne de mobilisation » a permis la réussite de cette opération de réinstallation et a sauvé de nombreuses vies. Je voudrais remercier chaque acteur pour sa contribution décisive au succès collectif de l’opération.
Il ne s’agit pas, bien sûr, de nier les difficultés rencontrées lors de la réinstallation des familles irakiennes en France. Le déracinement reste douloureux ; la réalité du quotidien, surtout dans les premiers temps de l’hébergement collectif, est parfois vécue comme une désillusion ; l’éloignement peut nourrir, malgré la fin des menaces, la nostalgie du pays où vous avez laissé une partie de votre vie.
Je voudrais dire à tous les réfugiés Irakiens qui traversent ces difficultés de garder espoir et de continuer, pour eux-mêmes et pour leurs enfants, à poursuivre leur intégration dans la société française.
Il leur appartiendra, le moment venu, quand les persécutions et les violences auront pris fin, de faire en conscience le choix du maintien en France ou du retour en Irak, pour continuer à faire vivre dans le pays d’origine la diversité de ses traditions religieuses.
Mais quel que soit votre choix, demain comme aujourd’hui, la France sera à vos côtés.