Brice HORTEFEUX, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration, a accordé un entretien au Figaro, publié dans son édition du mercredi 8 décembre 2010, dans lequel il dresse la feuille de route de sa politique d’immigration. p>
Pour le ministre de l’intérieur, désormais en charge de l’immigration, l’action du gouvernement repose en la matière sur « trois principes simples et justes » :
• « la France, comme tous les pays, a le droit de choisir qui elle veut et qui elle peut accueillir sur son territoire » ;
• « un étranger en situation irrégulière a vocation à être reconduit dans son pays d’origine, sauf situation politique, humanitaire, religieuse ou sanitaire particulière » ;
• « enfin, un étranger en situation légale, et respectant nos règles, doit bénéficier, pour l’essentiel, des mêmes droits économiques et sociaux que les Français. C’est en luttant contre l’immigration illégale que nous réussirons l’intégration des étrangers qui respectent nos règles communes ».
La mission confiée par le chef de l’État et le Premier ministre à Brice HORTEFEUX est « claire » : « poursuivre, conforter et amplifier la nouvelle politique d’immigration voulue par le président de la République ». Concrètement, cela signifie que « l’immigration illégale doit baisser et elle baissera ». Depuis 2007, près de 106 000 immigrés clandestins ont été éloignés. Ils sont 25 500 depuis le début de l’année. Parallèlement, un combat est mené avec vigueur contre « les passeurs, les mafieux, tous ces esclavagistes modernes qui exploitent la misère humaine » : depuis janvier, 156 filières ont été démantelées, contre 126 l’an dernier. C’est donc un « progrès record » a fait valoir le ministre. Enfin, l’efficacité de la surveillance des frontières s’améliore puisque « ceux qui tentent d’entrer sans visa ont été près de 100 000 à être refoulés depuis trois ans ».
Dans le même temps, le ministre reconnait que le système d’asile subit une forte pression à l’échelon européen. Depuis 2008, les demandes d’asile ont augmenté de 18 % en Allemagne, 24 % en Autriche et même 40 % en Belgique. Il note que « la France n’échappe pas à ce mouvement » : en effet, « nous sommes passés de 35 520 demandeurs en 2007 à 47 686 en 2009, avec une nouvelle hausse de 8 % sur les dix premiers mois de l’année ». La France est aujourd’hui la troisième destination au monde pour les demandes d’asile, après les États-Unis et le Canada. Et la première en Europe. Soulignant que cette augmentation du nombre de demandes entraine mécaniquement un allongement des délais d’instruction qui s’étendent jusqu’à dix-neuf mois - une situation que le ministre qualifie de « pas acceptable », il souhaite « mieux distinguer les vrais réfugiés politiques, en danger dans leur pays, des fraudeurs clandestins, qui n’ont rien de combattants de la liberté ». Et le ministre de promettre qu’il sera « attentif » à ce que la politique de l’asile ne soit « pas dévoyée ».
Pour faire baisser la pression de l’immigration clandestine, Brice HORTEFEUX annonce plusieurs initiatives :
· dès lundi 13 décembre, il réunira tous les préfets pour les « mobiliser à nouveau sur la lutte contre l’immigration clandestine ». Des instructions ont déjà été données aux quinze préfets qui n’ont pas atteint leurs objectifs. Dans les prochaines semaines, le ministre les réunira avec les consuls pour leur fixer ses priorités dans l’attribution de visas et leur demander d’être « plus vigilants dans la délivrance des visas de court séjour qui ne doivent pas être des "passeports pour la clandestinité" » ;
· le ministre entend appliquer le pacte européen qu’il a fait adopter à l’unanimité en 2008 : « L’Europe n’est pas une passoire. Elle doit se doter de nouveaux gardes-frontières pour mieux contrôler les frontières extérieures ». Lors du premier semestre 2011, il réunira les ministres en charge de l’immigration des cinq pays qui concentrent 80 % des flux migratoires vers l’Europe (Allemagne, Royaume-Uni, Espagne et Italie, en plus de la France) mais aussi ceux de Malte, de la Grèce et de Chypre, qui constituent les principaux points d’accès de l’immigration en Europe.
· enfin, Brice HORTEFEUX souhaite « poursuivre le dialogue avec les pays sources » parce que « c’est le meilleur moyen de maîtriser l’immigration, notamment avec le Maghreb et l’Afrique subsaharienne ». Depuis 2007, une quinzaine d’accords ont, d’ores et déjà, été signés.
Parallèlement à ces initiatives, le ministre de l’intérieur veut disposer de « nouveaux instruments juridiques » : un projet de loi, préparé sous l’autorité du Premier ministre, François FILLON, a été adopté en première lecture à l’Assemblée nationale. Il prévoit d’étendre la durée de rétention administrative de 30 à 45 jours, une idée qui fait « l’unanimité en Europe » souligne le ministre, qui indique que les sénateurs en débattront en janvier prochain.
Revenant sur le coût de l’immigration clandestine, Brice HORTEFEUX a rappelé qu’entre 2007 et fin 2008, des « estimations fantaisistes et grossières » avaient circulé, faisant état d’un coût de 2 milliards d’euros. Selon le rapport de l’inspection générale de l’administration établi à la fin 2009, le coût global est de 232 millions d’euros. Ce montant intègre la totalité des charges, l’hébergement, les frais de transport et les frais de personnels mobilisés mais ne prend pas en compte les « économies importantes » réalisées grâce à un meilleur contrôle de l’immigration. « Croyez-moi, cela coûterait beaucoup plus cher d’ouvrir nos frontières à tout vent ! » a souligné le ministre, qui a insisté sur sa mission : « permettre la cohésion de notre société et le respect de nos valeurs républicaines ».
Enfin, s’agissant des camps illicites, Brice HORTEFEUX a précisé que s’« il n’est pas question de stigmatiser telle ou telle communauté », il entendait poursuivre les démantèlements car « réprimer n’est pas un gros mot ». Depuis août dernier, 490 implantations illégales ont été évacuées, sur les 600 recensées.