Présentation du projet de loirelatif à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité
devant la Commission des Lois de l’Assemblée Nationale
Discours d Éric BESSON,
Ministre de l’immigration, de l’intégration,de l’identité nationale et du développement solidaire
Paris, le 8 septembre 2010
Seul le prononcé fait foi
Monsieur le Président,
Mesdames et messieurs les députés,
La France reste une terre d’accueil de l’immigration. Elle continue à délivrer chaque année plus de 180.000 titres de longs séjours. Et elle est désormais au deuxième rang mondial, derrière les Etats-Unis, pour l’accueil des réfugiés.
Dans le même temps, la France doit rester une terre d’intégration. Car notre cohésion nationale ne s’est pas construite par la juxtaposition de communautés. Dans la conception française de la Nation, tout ressortissant étranger qui s’établit en France a vocation à s’intégrer, puis à s’assimiler, et, à terme, à devenir Français.
Dans le cadre du débat sur l’identité nationale ouvert l’an passé, le séminaire gouvernemental présidé par le Premier ministre le 8 février 2010 a conclu à la nécessité de renforcer nos politiques d’intégration des immigrés qui s’établissent en France.
C’est pourquoi le projet de loi conditionne tout d’abord l’accès à la nationalité française à la signature d’une charte des droits et devoirs du citoyen.
Le projet de loi vise à faire de l’adhésion aux principes et valeurs essentiels de la République, et non plus de la seule connaissance des droits et devoirs conférés par la nationalité française, un élément d’appréciation de l’assimilation du postulant à l’acquisition de la nationalité française. Cette adhésion sera formalisée par la signature, au cours de l’entretien d’assimilation conduit en préfecture, d’une charte des droits et devoirs du citoyen. La charte sera remise au cours de la cérémonie d’accueil dans la citoyenneté française, à tous les nouveaux Français, quel que soit le mode d’acquisition de la nationalité (naturalisation, mariage, naissance en France de parents étrangers, etc.).
C’est aussi pourquoi le Gouvernement déposera une proposition d’amendement étendant les motifs de la procédure de déchéance de nationalité aux personnes ayant porté atteinte à la vie d’une personne dépositaire de l’autorité publique, en particulier les policiers et les gendarmes.
Des actes d’une gravité sans précédents ont été récemment commis, avec la prise à partie de forces de l’ordre par des assaillants, l’utilisation d’armes de guerres, et l’intention de tuer des agents au seul motif qu’ils exercent la mission première de l’Etat : assurer le respect de l’Etat de Droit. D’autres policiers ont fait l’objet de menaces de mort.
L’article 25 du Code civil précise, depuis la loi du 22 juillet 1996, qu’un individu peut, après avis du Conseil d’Etat, et dans un délai de 10 ans suivant son accession à la nationalité française, être déchu de la nationalité « s’il est condamné pour un acte qualifié de crime ou délit constituant une atteinte aux intérêts fondamentaux de la Nation ou pour un crime ou un délit constituant un acte de terrorisme ».
Dans l’objectif de protéger l’autorité de l’Etat, le Gouvernement souhaite que la procédure de déchéance de nationalité prévue à l’article 25 du Code civil soit étendue aux personnes qui, dans un délai de 10 ans suivant leur accession à la nationalité française, portent atteinte à la vie d’une personne dépositaire de l’autorité publique, en particulier un policier ou un gendarme.
Cet amendement respecte la jurisprudence du Conseil constitutionnel. Dans sa décision validant l’extension des motifs de déchéance opérée en 1996, le Conseil a jugé que ce principe d’égalité « ne s’oppose ni à ce que le législateur règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu’il déroge à l’égalité pour des raisons d’intérêt général pourvu que dans l’un et l’autre cas la différence de traitement qui en résulte soit en rapport avec l’objet de la loi qui l’établit » et que le législateur « peut, compte tenu de l’objectif tendant à renforcer la lutte contre le terrorisme, prévoir la possibilité, pendant une durée limitée, pour l’autorité administrative de déchoir de la nationalité française ceux qui l’ont acquise, sans que la différence de traitement qui en résulte viole le principe d’égalité ».
L’objectif de l’amendement est de lutter contre les atteintes aux intérêts essentiels de l’Etat, c’est-à-dire à la vie de ses agents. Les actes portant atteinte à la vie d’une personne dépositaire de l’autorité publique, par leur nature et par leur gravité, peuvent être rapproché des « atteintes aux intérêts fondamentaux de la Nation » et des « actes de terrorisme » auxquels l’article 25 du Code civil fait d’ores et déjà référence.
Cet amendement maintient les motifs de déchéance bien en-deçà de ce qu’ils étaient depuis 1945 et jusqu’à la loi du 16 mars 1998. L’article 98 de l’ordonnance du 19 octobre 1945 portant code de la nationalité prévoyait ainsi la déchéance pour l’étranger « condamné en France ou à l’étranger pour un acte qualifié crime par la loi française et ayant entraîné une condamnation à une peine d’au moins cinq années d’emprisonnement. » Rien n’indique que le Conseil constitutionnel validerait un amendement revenant au texte de 1945, et mon pronostic, je vous le dis, est plutôt réservé sur ce point.
La France participe par ailleurs à la construction progressive d’une politique européenne de l’immigration et de l’asile, complément indispensable du grand espace de libre-circulation issu des accords de Schengen. Elle est à l’origine du Pacte européen sur l’immigration et l’asile, adopté à l’unanimité par l’ensemble des Etats membres de l’Union européenne le 16 octobre 2008. Trois directives européennes ont été adoptées par la suite, qui créent un cadre juridique global et harmonisé pour une politique européenne de l’immigration, dont le projet de loi assure la transposition en droit français :
Première directive transposée par ce projet de loi : la directive du 25 mai 2009 établissant les conditions d’entrée et de séjour des ressortissants de pays tiers aux fins d’un emploi hautement qualifié, dite « directive carte bleue » ;
En application de cette directive, le projet de loi met en place le premier titre de séjour européen, ouvrant le même droit au séjour et au travail dans l’ensemble des 27 Etats membres de l’Union européenne, pour les travailleurs hautement qualifiés (au minimum, diplôme BAC+3, ou justifiant d’une expérience professionnelle d’au moins 5 ans).
Une part importante des ressortissants étrangers qui entrent et séjournent aujourd’hui en France satisfont d’ores et déjà les critères de formation et d’expérience professionnelle conditionnant la délivrance de ce titre de séjour européen. En 2009, plus de 25% des ressortissants étrangers autorisés à entrer et séjourner en France pour une durée supérieure à 3 mois étaient titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur.
Deuxième directive transposée par ce projet de loi : la directive du 18 juin 2009 prévoyant des normes minimales concernant les sanctions et les mesures à l’encontre des employeurs de ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite « directive sanctions ».
L’objectif est de lutter contre ceux qui exploitent l’immigration irrégulière.
En application de cette directive, le projet de loi met en place un ensemble de sanctions administratives, financières et pénales contre les personnes physiques ou morales qui recourent sciemment, directement ou indirectement, à l’emploi d’étrangers sans titre de séjour.
Le projet de loi oblige les employeurs à tenir, au moins pendant la durée de la période d’emploi, une copie de l’autorisation de séjour à la disposition des autorités compétentes.
Le projet de loi met en place un arsenal de sanctions administratives très dissuasif. L’autorité administrative pourra, en cas d’emploi d’étrangers en situation irrégulière :
• rendre les employeurs inéligibles aux appels d’offres nationaux et européens, pendant une durée maximale de 6 mois ;
• rendre les employeurs inéligibles aux aides publiques nationales et européennes en matière d’emploi, de formation professionnelle et de culture, pendant une durée maximale de 5 ans ;
• imposer aux employeurs le remboursement des aides publiques reçues l’année précédant l’infraction relevée, en matière d’emploi et de formation professionnelle ;
• ordonner par décision motivée la fermeture d’un établissement, à titre provisoire et pour une durée ne pouvant excéder trois mois. Les modalités de cette fermeture, qui pourra s’accompagner de la saisie à titre conservatoire du matériel professionnel des contrevenants, seront fixées par décret en Conseil d’Etat. En tout état de cause, cette décision de fermeture administrative d’un établissement sera proportionnée à l’ampleur des faits constatés.
Le projet de loi responsabilise les donneurs d’ordre. Il prévoit que tout maître d’ouvrage informé par écrit par un agent de contrôle, par un syndicat ou une association professionnels ou une institution représentative du personnel, de l’intervention d’un sous-traitant en situation irrégulière au regard de l’emploi d’étranger sans titre de séjour, doit enjoindre aussitôt à son cocontractant de faire cesser sans délai cette situation. A défaut, il est tenu ainsi que son cocontractant solidairement avec le sous-traitant employant l’étranger sans titre au paiement des impôts, taxes, cotisations, ainsi que des rémunérations et charges, contributions et frais. La responsabilité solidaire des maîtres d’ouvrage est l’un des points important du texte.
Troisième directive transposée par ce projet de loi : la directive du 16 décembre 2008 relative aux normes et procédures applicables dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, dite « directive retour ».
En application de cette directive, le projet de loi ouvre la possibilité pour l’autorité administrative d’assortir sa décision d’éloignement d’une « interdiction de retour sur l’ensemble du territoire européen » d’une durée de 3 ans, pouvant être portée dans certains cas à 5 ans. Tout étranger ne respectant pas le délai de départ volontaire (1 mois), qui lui a été accordé, pourra se voir infliger cette interdiction de retour sur le territoire des 27 Etats membres de l’Union européenne.
La procédure de l’interdiction de retour est entourée de plusieurs garanties :
• Elle n’est pas automatique. Le préfet peut la prendre dans certains cas, par exemple le non-respect du délai de retour volontaire. Il n’y est jamais obligé.
• Elle est modulable et proportionnée. La loi pose le principe selon lequel il sera tenu compte de la durée de la présence de l’étranger sur le territoire, de la nature et de l’ancienneté de ses liens avec la France.
• Elle est abrogée automatiquement si l’étranger respecte le délai qui lui est accordé pour quitter volontairement le territoire.
Enfin, nos efforts d’intégration de l’immigration légale et de lutte contre l’immigration illégale seront vains, si nos procédures d’éloignement des étrangers en situation irrégulière restent aussi peu efficaces. Sur 96.109 ressortissants étrangers en situation irrégulière interpellés en 2009 en France métropolitaine, 85.101 ont fait l’objet d’une décision d’éloignement (APRF ou OQTF), et 29.288 seulement ont été effectivement reconduits dans leur pays d’origine, de manière volontaire (8.268) ou contrainte (21.020). Le taux d’échec des décisions d’éloignement dépasse 75%.
Afin d’améliorer l’efficacité des procédures d’éloignement, le projet de loi s’inspire des conclusions du rapport de la commission présidée par Pierre Mazeaud, ancien président du Conseil constitutionnel, remis le 11 juillet 2008.
Première mesure visant à renforcer l’efficacité de nos procédures d’éloignement : une meilleure articulation de l’intervention du juge administratif et du juge judiciaire.
En France, deux juges interviennent dans la procédure d’éloignement, en cas de placement en rétention. Le juge administratif, doit être saisi dans les 48h, et dispose d’un délai de 72h pour se prononcer. Le juge judiciaire doit pour sa part être saisi et statuer dans un délai de 48h.
Cette situation pose d’importantes difficultés :
• Comme le rapport Mazeaud l’a souligné, ce délai de 48 heures imparti au juge judiciaire est trop court, et abouti à « l’enchevêtrement des procédures judiciaire et administrative », cause d’insécurité juridique ;
• L’administration a une double tâche en un court moment, car elle doit conduire deux procédures juridictionnelles en parallèle (escorte, présentation, défense). L’étranger est transporté dans des délais très courts en plusieurs endroits différents.
• Surtout, les décisions juridictionnelles rendues peuvent être contradictoires :
o Une décision du JLD qui refuse la prolongation du maintien en rétention au-delà de 48h, sur le fondement de l’illégalité de la mesure administrative de reconduite, et remet ainsi le retenu en liberté, puis du TA, dans le délai de 5 jours, qui confirme la légalité de la mesure.
o Une décision du JLD qui autorise la prolongation du maintien en rétention au-delà de 48 heures, sur le fondement de la légalité de la mesure administrative de reconduite, puis du TA intervenant après 5 jours de rétention pour annuler cette mesure.
o Le rapport de la commission présidée par Pierre Mazeaud conclut ainsi que « la précipitation actuelle est excessive et nuit à la fois à la justice, dont elle mobilise abusivement les membres : juge, personnel de greffe, personnels de sécurité, à la mise en œuvre de la politique des pouvoirs publics, dont les demandes sont examinées dans des conditions exécrables, et aux étrangers eux-mêmes qui, levés à l’aube, attendent interminablement dans les salles du TGI, sans confort et dans la promiscuité ».
Le projet de loi prévoit un délai de 48h pour saisir le juge administratif, puis un délai de 72h accordé au juge administratif pour statuer, puis un délai de 24h pour saisir le juge judiciaire.
Cet enchaînement résulte de plusieurs nécessités incontournables :
• Le délai de 48h pour saisir le juge administratif est indispensable pour permettre à la personne placée en rétention et aux personnes qui l’assistent dans l’exercice de ses droits de prendre connaissance de l’ensemble du dossier, et de préparer la procédure contentieuse.
• Les concertations avec les associations de magistrats et le Conseil d’Etat ont abouti à la fixation d’un délai de 72h, indispensable pour permettre au juge administratif de se prononcer sur la légalité des 6 décisions pouvant désormais viser la personne placée en rétention (décision de refus de titre de séjour, décision d’éloignement, décision de refus du délai de départ volontaire, décision fixant le pays de renvoi, décision d’interdiction de retour sur le territoire européen, décision de placement en rétention).
• Ce délai de 5 jours pour l’intervention du juge judiciaire après celle du juge administratif :
o N’exprime aucune défiance à l’égard du juge judiciaire. Le juge administratif est le juge naturel de la légalité des décisions administratives. Le juge judiciaire doit statuer sur le maintien en rétention. Et le juge administratif n’est pas moins protecteur des libertés que le juge judiciaire. La Cour de cassation a d’ailleurs jugé que seul le juge administratif pouvait connaître de la légalité de la décision administrative de placement en rétention, le JLD ne devant intervenir qu’au stade de la prolongation.
o Ne réduit pas l’étendue du contrôle juridictionnel. Rien ne permet de présager de la jurisprudence de la juridiction administrative, notamment dans le cadre du référé liberté en cas « d’atteinte grave et manifestement illégale » à la liberté individuelle.
o Ne porte pas atteinte à la possibilité pour l’étranger en situation irrégulière visé par une mesure d’éloignement de déposer un recours suspensif contre cette décision : aucun étranger ne pourra être éloigné sans avoir eu la possibilité de former un recours suspensif contre la décision d’éloignement.
o Répond à un objectif de valeur constitutionnelle : l’amélioration du fonctionnement de la justice.
o Est proche de durées déjà validées par le Conseil constitutionnel, comme le délai de 4 jours de maintien en zone d’attente avant l’intervention du juge judiciaire, prévu par la loi du 20 novembre 2007.
Deuxième mesure visant à améliorer l’efficacité de nos procédures d’éloignement : l’allongement de la durée maximale de rétention administrative, afin de faciliter l’obtention des laissez-passer consulaires.
Afin de permettre la délivrance du laissez-passer consulaire dans le délai nécessaire, le projet de loi porte la durée maximale de rétention administrative de 32 jours (2 jours + 15 jours après une première prolongation + 15 jours après une deuxième prolongation) à 45 jours (5 jours + 20 jours après une première prolongation + 20 jours après une deuxième prolongation).
• Cet allongement est nécessaire pour faciliter la délivrance par les pays d’origine des laissez-passer consulaires.
• Cet allongement est aussi nécessaire pour permettre la conclusion d’accords bilatéraux de réadmission.
Les accords de réadmission récemment conclus avec des pays sources d’immigration prévoient des délais de délivrance des laissez passer consulaire proches de 30 jours. Or ce délai court à partir de la présentation de la demande de laissez-passer voire de la présentation de la personne devant le consulat, et n’intègre pas le délai nécessaire à l’organisation matérielle de la reconduite.
• Cet allongement est désormais nécessaire pour permettre la conclusion d’accords européens de réadmission.
Un nombre croissant d’accords de réadmission se négocient désormais au niveau européen. Les négociations sont engagées depuis un an, au niveau européen, avec de grands pays sources d’immigration de la France. La France se trouve désormais placée devant une contradiction entre sa volonté de favoriser la conclusion d’accords au niveau européen, et une durée de rétention très inférieure à celle des autres Etats membres de l’Union européenne. Le projet d’accord européen en cours de négociation avec la Turquie prévoit par exemple un délai de réponse aux demandes de réadmission de 25 jours, incompatible avec une durée maximale de rétention administrative de 32 jours. Le projet d’accord européen en cours de négociation avec le Vietnam s’oriente vers un délai de 30 jours, incompatible avec une durée maximale de rétention administrative de 32 jours.
• Cette durée restera très nettement inférieure à la durée maximale fixée par la directive communautaire, qui est de 6 mois, avec possibilité de 12 mois supplémentaires.
• La France restera le pays européen dont la durée maximale de rétention est, de loin, la plus courte. Elle est aujourd’hui de 60 jours au Portugal, de 6 mois aux Pays-Bas, en Autriche ou en Hongrie, de 8 mois en Belgique, 18 mois en Allemagne, de 24 mois en Suisse, illimitée au Royaume-Uni. L’écart de la France par rapport aux autres pays européens tend même à s’accroître. Deux partenaires essentiels de la France pour la lutte contre les filières d’immigration irrégulière, l’Espagne et l’Italie, ont récemment accru la durée maximale de rétention administrative :
o L’Espagne, par la loi du 11 décembre 2009, vient de porter sa durée maximale de rétention de 40 jours à 60 jours.
o L’Italie, par la loi du 2 juillet 2009, vient de porter sa durée maximale de rétention de 2 mois à 6 mois.
Troisième mesure visant à améliorer l’efficacité de nos procédures d’éloignement : le projet de loi crée un dispositif d’urgence adapté aux afflux d’étrangers en situation irrégulière en dehors des points de passage frontaliers.
Le préfet pourra créer une zone d’attente temporaire, qui relie les lieux de découverte d’un groupe de migrants au point de passage frontalier, où sont normalement effectués les contrôles des personnes. Pour recourir à cette disposition, il sera nécessaire d’établir que le groupe d’étrangers contrôlés vient manifestement de franchir la frontière en-dehors d’un point de contrôle.
L’affaire des 123 ressortissants kurdes arrivés sur les plages de Bonifacio le 22 janvier 2010 a une nouvelle fois révélé une faiblesse de notre législation, justement sanctionnée par les juges : lorsque de nombreux ressortissants étrangers se présentent à notre frontière en dehors de tout point de passage, compte tenu de la difficulté à réunir dans des délais suffisamment courts les interprètes, avocats, médecins, les autorités judiciaires se trouvent devant l’impossibilité d’organiser l’interpellation et la garde à vue de ces personnes, et les autorités administratives se sont trouvées devant l’impossibilité matérielle de les maintenir sous un quelconque régime de contrôle administratif.
Le régime juridique applicable à la zone d’attente temporaire sera identique à celui de la zone d’attente permanente, créé par loi du 6 juillet 1992.
Enfin, des mesures supplémentaires seront ajoutées. Le Gouvernement déposera trois propositions d’amendement facilitant ces éloignements, y compris, dans certaines circonstances, lorsqu’ils concernent des ressortissants de l’Union européenne.
Il convient de rappeler que les ressortissants européens ne jouissent pas d’une liberté de séjour sans limite au sein de l’Union européenne. Ces limites sont fixées par la directive communautaire du 29 avril 2004 : Pour les séjours de moins de trois mois, ils ne doivent pas menacer l’ordre public ou constituer une charge déraisonnable pour notre système d’assistance sociale. Pour les séjours de plus de trois mois, ils doivent disposer d’un emploi ou de ressources suffisantes.
Un premier amendement permettra de sanctionner par une obligation de quitter le territoire français (OQTF) ceux qui abusent du droit au court séjour par des allers-retours successifs, afin de contourner les règles plus strictes du long séjour.
Un deuxième amendement permettra la reconduite dans leurs pays d’origine des personnes qui représentent une charge déraisonnable pour notre système d’assistance sociale.
Un troisième amendement élargira les possibilités de prendre des arrêtés de reconduite à la frontière pour menace à l’ordre public, à l’occasion d’actes répétés de vols ou de mendicité agressive.
Mesdames et messieurs les députés, avec ce projet de loi, nous contribuons à la mise en place d’une politique française d’immigration et d’intégration équilibrée, juste et ferme, assurant à la fois la maîtrise de l’immigration et l’intégration effective des migrants. Avec ce projet de loi, nous respectons les engagements souscrits par le Président de la République devant les Français, et l’une des priorités de l’action du Gouvernement.
Je vous remercie de votre attention.