Il est indispensable que les mineurs étrangers isolés, particulièrement vulnérables, puissent bénéficier de garanties protectrices.
Selon les indications chiffrées fournies par la Direction centrale de la police aux frontières (DCPAF), plus de 90% des mineurs étrangers isolés (MEI) entrant en France par voie aérienne arrivent à l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle. Il est constaté que leur nombre est en progression depuis plusieurs années et que la proportion de moins de 13 ans est elle aussi en augmentation. Il apparait donc indispensable que les MEI, qui sont particulièrement vulnérables, puissent bénéficier de toutes les garanties prévues par les textes.
Lorsqu’un mineur fait l’objet d’une décision de non admission (absence de document, document contrefait, document authentique mais absence de visa rendu nécessaire par sa nationalité…), cette décision lui est notifiée, dans une langue qu’il comprend, dans les conditions prévues par l’article L. 213-2 du CESEDA : mention du droit d’avertir la personne chez laquelle il devait se rendre, son consulat et le conseil de son choix. En cas de demande d’asile, sont également précisés les voies et délais de recours contre la décision refusant l’entrée au titre de l’asile. La notification est traduite par un interprète, physiquement présent ou requis par téléphone.
La DCPAF a donné des instructions pour que, dans toutes les zones d’attente (ZA) placées sous sa responsabilité, le bénéfice du délai d’un jour franc prévu par l’article L 213-2 du CESEDA avant tout rapatriement soit accordé automatiquement aux MEI, même s’ils n’en font pas la demande, afin qu’ils puissent bénéficier de toutes les informations et conseils utiles sur leur situation.
Le CESEDA n’opère pas de distinction entre majeurs et mineurs en ce qui concerne le maintien en ZA, hormis l’article L 221-5, qui prévoit la désignation sans délai par le Procureur de la République d’un administrateur ad hoc chargé d’assister le mineur et de le représenter dans toutes les procédures.
Le placement en zone d’attente est notifié, si nécessaire, par le biais d’un interprète. Dès l’engagement de la mesure de maintien en zone d’attente, l’officier de quart de la DPAF en informe le Parquet près le tribunal de grande instance afin qu’il soit désigné un administrateur ad hoc.
La désignation des administrateurs ad hoc est faite par le Parquet, sur la base d’une liste d’associations mise à jour tous les 4 ans. A Roissy, elle est faite sans délai, par le Parquet des mineurs. Les désignations tardives sont liées aux découvertes, elles même tardives, de mineurs errant dans la zone internationale. Le dessaisissement de l’administrateur ad hoc est prononcé dans les mêmes formes, par ordonnance du Parquet.
En présence de l’administrateur ad hoc, le mineur fait l’objet d’une audition qui a pour but d’identifier son domicile dans son pays, mais aussi d’apporter des précisions sur les personnes qui l’avaient en charge dans ce pays, les personnes qui l’ont accompagné à l’aéroport, les personnes qui étaient susceptibles de l’accueillir à son arrivée et, le cas échéant, le domicile de ses parents dans le pays de destination.
L’audition peut également permettre de cerner l’état d’esprit du mineur, de déceler une volonté de rejoindre ou de fuir telle ou telle personne de son entourage, de recueillir toute confidence. Elle peut faire l’objet d’un compte rendu au Parquet si elle venait à dénoncer une infraction pénale. L’administrateur ad hoc, conformément à la circulaire JUS CO5 20090C n°CIV/01/05 du 14 avril 2005, est destinataire de tous les actes de procédure concernant le mineur et est informé des dates et heures de toutes les auditions et notifications. Les personnes attendant un MEI peuvent également être identifiées et interpellées dans le cadre d’une procédure judiciaire d’aide à l’immigration.
L’administrateur ad hoc doit être prévenu des demandes de visites auprès du mineur, mais il n’entre pas dans ses compétences de les autoriser ou de les interdire.
Le CESEDA, dans sa partie consacrée à l’examen des demandes d’asile à la frontière, n’inclut aucune disposition spécifique aux mineurs isolés, dont l’entrée sur le territoire peut donc être refusée si leur demande apparaît "manifestement infondée", au sens de l’article L.221-1. Cependant, lorsque la demande d’asile est formulée par un mineur isolé, il est assisté et représenté par l’administrateur ad hoc qui a été désigné lors du placement en zone d’attente.
Le mineur est informé, dans une langue qu’il comprend, de la procédure de demande d’asile, de ses droits et obligations et des aides dont il peut bénéficier pour présenter sa demande. Il est maintenu dans la zone d’attente le temps nécessaire à l’examen tendant à déterminer si sa demande n’est pas manifestement infondée. Les administrateurs ad hoc assistent systématiquement à l’entretien mené par l’officier de protection de l’OFPRA.
L’administrateur ad hoc assure la représentation du mineur dans le cadre des procédures administratives et juridictionnelles relatives à la demande d’asile (article L. 751-1 du CESEDA). Il pourra s’agir selon le stade de la procédure de phases successives, à la frontière, devant l’OFPRA et le cas échéant la CNDA, donc de missions distinctes, si possible exercées par la même personne.
A Roissy, tout mineur non accompagné de moins de 13 ans est systématiquement accueilli dans une zone d'hébergement dédiée dont la capacité est de 6 places qui a été mise en service en juillet 2011.Tout mineur de 13 à 18 ans est également accueilli dans cette zone dans la limite des places disponibles. La Croix-Rouge française assure la prise en charge de ce secteur par le biais d'une convention renouvelée par avenant le 30 mai 2012 et encadre ces mineurs par le biais d'un personnel disposant de compétence dans le domaine de la petite enfance.
Les moins de 13 ans sont hébergés dans un hôtel de la plateforme aéroportuaire, sous la responsabilité d’une nurse, mandatée par la compagnie aérienne qui a assuré le transport jusqu’à Paris.
Les plus de 13 ans sont accueillis dans la même zone que les adultes le jour et sont hébergés la nuit en chambres séparées.
Deux hypothèses sont possibles : le réacheminement ou l’admission sur le territoire français.
Préalablement à tout réacheminement, une enquête est menée auprès des autorités du pays d’origine du mineur. C’est en effet le réacheminement vers le pays d’origine et non vers celui de provenance qui est privilégié par les services de la police aux frontières.
Cette position n’est pas en contradiction avec la convention de Chicago de 1944 relative à l’aviation civile internationale. Si la convention prévoit dans son annexe 9 le principe du retour vers le pays de provenance (« l’exploitant d’aéronefs refoulera la personne non admissible au point où elle a commencé son voyage »), elle permet aussi un renvoi « à tout autre endroit ou elle (la personne non admissible) peut être admise ».
Le choix de privilégier le pays d’origine est particulièrement souhaitable quand le MEI a transité par des pays tiers dans lesquels son renvoi serait totalement inapproprié.
La police aux frontières sollicite la délégation du Service de Coopération Technique Internationale de la Police (SCTIP) qui couvre 140 pays, afin d’obtenir l’autorisation du pays d’accueil, et de permettre la prise en charge du mineur soit par sa famille, soit par une institution chargée de la protection des mineurs. Des vérifications sont faites sur les garanties de la protection qui sera assurée au mineur.
Lorsque le juge des libertés a refusé la prolongation de maintien en ZA et qu’aucun réacheminement n’est possible, les MEI sont confiés par le juge à l’aide sociale à l’enfance (ASE) ou à un établissement particulier (placement direct). Ils sont accueillis le plus souvent dans les structures de droit commun de l’ASE et, plus rarement, dans quelques structures spécialisées pour l’accueil de ces mineurs.
Lorsqu’une décision de placement du juge des enfants est nécessaire, les mineurs peuvent être confiés à l’Aide sociale à l’enfance ou directement à un établissement du secteur associatif habilité de la PJJ. Les établissements du secteur public de la protection judiciaire de la jeunesse accueillent prioritairement des mineurs dans le cadre de l’enfance délinquante. La DPJJ reste compétente en assistance éducative pour l’exercice des mesures d’investigation et intervient dans l’habilitation du secteur associatif en assistance éducative conjointement avec les services du conseil général.
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