9 ressortissants afghans en situation irrégulière interpellés sur le territoire national ont été reconduits vers leur pays d’origine mercredi 16 décembre 2009. Leur avion a décollé de l’aéroport de Roissy Charles de Gaulle, le mardi 15 décembre 2009 à 22h30, et s’est posé à Kaboul, le mercredi 16 décembre 2009 à 8h30. Ils ont été admis officiellement par les autorités afghanes à 9h30.
Cet avion, un A320 de la compagnie British Midland, était affrété par le Home Office britannique. Il transportait aussi 21 ressortissants afghans en situation irrégulière interpellés en Grande-Bretagne.
Ces 9 personnes ont été interpellées, pour 8 d’entre elles, dans la région de Calais, et pour la neuvième, lors d’un transit dans la région de Lyon, dans la gare d’Aix les Bains.
Aucune de ces 9 personnes n’est originaire des régions du sud de l’Afghanistan, qui sont les plus troublées.
1. Toutes les solutions alternatives ont été préalablement proposées à ces personnes :
Une aide au retour volontaire, comportant à la fois la prise en charge des frais de réacheminement et une aide à la réinsertion. Plus de 200 ressortissants afghans en situation irrégulière interpellés ont déjà demandé cette aide délivrée en partenariat avec l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) en 2009. Les neuf personnes concernées ont refusé ces propositions.
Le dépôt d’une demande d’asile. Une seule demande d’asile a été déposée et a été rejetée par l’OFPRA. Il n’y a pas eu d’autres demandes d’asile, alors que les personnes avaient la possibilité de le faire à tout moment de leur présence en France et que ce droit leur a été notifié une dernière fois, dans leur langue d’origine, au moment de leur placement en rétention.
2. Les lois de la République ont été mises en oeuvre et les décisions de justice scrupuleusement respectées.
Chacune de ces personnes a bénéficié d’une assistance juridique et administrative dans l’exercice de ses droits, mise en oeuvre par la CIMADE et financée par l’Etat. Chacune de ces personnes a été présentée devant les juridictions de l’ordre judiciaire (Juge des Libertés et de la Détention), qui ont validé l’ensemble de la procédure d’interpellation, de placement et de maintien en rétention, et ont notamment vérifié le respect des droits à chaque étape de la procédure.
Chacune de ces personnes a été présentée et identifiée formellement par l’ambassade d’Afghanistan à Paris comme ressortissant afghan engagé dans une procédure de retour contraint. Sur la base de cette identification, un laissez passer européen a été délivré par mes services, conformément à l’accord donné par les autorités afghanes, aux recommandations du Conseil de l’Union européenne de 1994, et aux règles suivies par les autres pays européens, dont la Grande-Bretagne.
Lorsqu’un recours a été déposé devant la juridiction administrative contre la mesure d’éloignement, ce recours a été rejeté, le juge administratif ne considérant pas que l’éloignement de cette personne l’expose à des risques de traitements inhumains. Il en a été de même devant la Cour Européenne des Droits de l’Homme, qui n’a prononcé la suspension d’aucune des mesures d’éloignement.
3. Un dispositif d’accueil et d’aide à la réinsertion a été mis en place en Afghanistan.
Les personnes reconduites bénéficient à leur retour d’un service d’accueil et de réinsertion mis en oeuvre par l’Office Français de l’Immigration et de l’Intégration (OFII) et l’Organisation Non Gouvernementale allemande AGEF.
Ce dispositif prévoit la remise immédiate d’un pécule de 150 Euros à l’arrivée, une information sur les actions de formation et d’aide au retour à l’emploi, la possibilité d’un hébergement provisoire dans un hôtel de Kaboul pour une durée maximale de 15 jours. L’AGEF dispose d’une implantation territoriale en Afghanistan. Le dispositif de formation et d’aide au retour à l’emploi comportera ainsi des prestations d’accompagnement personnalisé dans la ville où la personne reconduite aura choisi d’installer sa résidence. Ces prestations représentent pour la France une dépense pouvant aller jusqu’à 2.000 Euros par personne.
4. Ces mesures de retour contraint sont légitimes.
Ces mesures font application des lois de la République, qui prévoient que les étrangers en situation irrégulière qui ne disposent d’aucun droit à séjourner sur notre territoire et ne demandent pas ou se voient refuser l’asile ont vocation à être reconduits dans leur pays d’origine.
Ces mesures font application de l’accord entre le gouvernement afghan, le gouvernement français, et le Haut Commissariat aux Réfugiés des Nations Unies (HCR), signé le 28 septembre 2002, qui prévoit des retours groupés.
La totalité des pays visés par les filières d’immigration clandestine en provenance d’Afghanistan mettent en place de telles mesures de retour contraint, qu’il s’agisse du Royaume-Uni (373 retours forcés en 2008 et près de 900 depuis le début de l’année 2009), de la Norvège (100), de l’Allemagne (40), de la Suède ou des Pays-Bas (une dizaine). Le seul fait que le pays d’origine soit en guerre ne vaut titre de séjour dans aucun des grands pays développés.
La France elle-même a mis en oeuvre des mesures de retour contraint vers l’Afghanistan chaque année depuis plus de dix ans, y compris au cours de la période 1997-2002 comme l’a reconnu Jean-Pierre Chevènement, sous le régime des talibans (17 mesures exécutées en 2000, 18 en 2001), qui pratiquait, entre autres, l’amputation des délinquants, et la lapidation jusqu’à ce que mort s’ensuive des femmes adultères et des homosexuels.
Un organisme reconnu et indépendant comme l’OFPRA, mais aussi le juge judiciaire, le juge administratif, et la Cour Européenne des Droits de l’Homme, n’ont trouvé aucun élément permettant de justifier le maintien sur notre territoire et la non exécution d’une mesure d’éloignement.
La France ne peut être à la fois l’un des pays les plus généreux au monde pour la demande d’asile en provenance de l’Afghanistan, et l’un des seuls à refuser toute mesure de reconduite contrainte de ressortissants afghans en situation irrégulière. On ne peut pas à la fois être attaché à l’asile et accepter le détournement de l’asile à des fins de migration économique.
Dans aucun pays du monde le seul fait d’être originaire d’un pays en guerre ne vaut titre de séjour. La France ne peut accueillir l’ensemble des ressortissants de tous les pays en guerre dans le monde (20 pays). Les 31 millions d’Afghans, en particulier, ne sauraient disposer d’un titre de séjour en France au seul motif de leur nationalité.
5. Le dispositif de protection temporaire prévu par la directive du 20 juillet 2001, dont le Parti socialiste propose l’application aux ressortissants afghans présents en France, est en réalité inopérant.
La mise en oeuvre de ce dispositif résulte, comme le prévoit l’article 5 de la directive, d’une décision du Conseil de l’Union européenne « adoptée à la majorité qualifiée sur proposition de la Commission ». Or ni la Commission ni aucun Etat membre n’a à ce jour fait une telle proposition.
Aux termes de la directive du 20 juillet 2001, ce dispositif ne peut être mis en oeuvre qu’ « en cas d’afflux massif de personnes déplacées ». Les Afghans présents dans l’Union européenne, estimés à quelques milliers, ne correspondent pas à cette hypothèse, comme la Commission européenne a déjà eu l’occasion de l’indiquer. La présence d’Afghans en Europe ne constitue pas un « afflux massif », notion qui correspond à une arrivée immédiate et très importante de personnes (plusieurs centaines de milliers) ayant pour effet de paralyser les organes chargés de statuer sur les demandes de protection (l’OFPRA en France). La notion de personnes déplacées fait référence à une situation de conflit armé généralisé dans le pays concerné ou à des pratiques de purification ethnique, ce qui n’est pas le cas de l’Afghanistan comme l’ont jugé les différentes juridictions nationales et européennes, en particulier la Cour Européenne des Droits de l’Homme, qui ont autorisé le retour dans leur pays d’Afghans qui n’y étaient pas menacés.
La France a reçu en 2008 250 demandes d’asile de ressortissants afghans. Un tiers de ces demandeurs environ a obtenu une protection, ce qui montre bien qu’à côté de personnes qui ont quitté l’Afghanistan en raison des persécutions dont elles faisaient l’objet, il existe également une immigration économique. Cette immigration économique cherche essentiellement à gagner l’Angleterre.
6. La fermeté dans la lutte contre l’immigration clandestine et la qualité de l’accueil de l’immigration légale sont les deux pans d’une même stratégie.
En ce qui concerne les 160 interprètes employés par l’armée française en Afghanistan, le Ministre examinera avec toute l’ouverture nécessaire les demandes de protection qui pourraient être présentées, compte tenu de l’engagement de ces personnes au service de la France, et des menaces dont elles pourraient faire l’objet à l’issue de leur contrat. Aucune demande formelle n’a cependant été adressée à ce jour.
En ce qui concerne notre politique des visas, pour les ressortissants afghans comme pour les autres étrangers souhaitant séjourner en France, il convient de rappeler la réglementation en vigueur :
La définition de la politique d’attribution des visas est une compétence conjointe du Ministère de l’immigration et du Ministère des affaires étrangères, conformément à l’article 1er du décret du 31 mai 2007.
Pour le traitement des dossiers individuels de demande de visa, les chefs de mission diplomatique et les chefs de poste consulaire se conforment aux instructions particulières qui leur sont adressées par le seul Ministre chargé de l’immigration, conformément à l’article 4 du décret du 13 novembre 2008 relatif aux attributions des chefs de mission diplomatique et des chefs de poste consulaire en matière de visas.
C’est donc bien le même ministère qui met en oeuvre les mesures d’éloignement contraint vers le pays d’origine, et qui assure la délivrance des visas d’entrée sur notre territoire.
Concernant l’immigration, il n’y a pas dans le Gouvernement un ministère de la fermeté et un ministère de la générosité. Le ministère de l’immigration, de l’intégration, de l’identité nationale et du développement solidaire est chargé à la fois de la lutte contre l’immigration irrégulière, et de l’accueil et de l’intégration de l’immigration légale, qui sont les deux pans d’une même stratégie.